CFM 2019

Validation d'un modèle pour un polymère électro-actif
Mireille Tixier  1, *@  , Joël Pouget  2, *@  
1 : Université de Versailles Saint Quentin - Département de Physique
Ministère de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique
45, avenue des Etats-Unis, 78035 Versailles -  France
2 : Institut Jean Le Rond d'Alembert  (IJLRA)
CNRS : UMR7190, Sorbonne Universités, UPMC, CNRS
* : Auteur correspondant

Les polymères électro-actifs (PEA) ioniques sont susceptibles de se déformer sous l'action d'un champ électrique, ce qui leur confère de nombreuses applications comme capteur, actionneur ou récupérateur d'énergie.

Un composite métal-polymère ionique (IPMC) est constitué d'un film de polymère ionique recouvert sur ses deux faces d'une fine couche de métal servant d'électrodes. Le polymère est saturé d'eau, ce qui entraîne sa dissociation quasi complète ; les ions négatifs restent attachés aux chaînes polymères qui peuvent être considérées comme un milieu poreux dans les pores duquel se déplacent l'eau et les cations. L'application d'un champ électrique perpendiculaire à la lame entraîne la flexion de celle-ci; inversement, le fléchissement de la lame fait apparaître une différence de potentiel entre les électrodes. Ce phénomène fait intervenir des couplages multiphysiques de type électro-mécano-chimiques : sous l'effet du champ électrique, les cations se déplacent vers l'électrode négative, entraînant avec eux une partie de l'eau par un phénomène d'osmose ; ce déplacement d'eau fait gonfler le polymère du côté de l'électrode négative tandis que son volume diminue du côté opposé, provoquant la flexion de la lame.

Ce système peut être modélisé en utilisant une approche de type « milieu continu » : il peut en effet être considéré comme un milieu poreux déformable dans lequel s'écoule une solution ionique ; les trois constituants (le solide, l'eau et les cations) sont mobiles les uns par rapport aux autres. Nous avions préalablement établi les lois de comportement de ce matériau : nous avons écrit les lois de conservation et la relation de Gibbs pour chacune des phases à l'échelle microscopique, puis macroscopique, et enfin pour le matériau complet grâce à une technique de moyenne. La thermodynamique des processus irréversibles linéaires nous avait ensuite permis d'en déduire ses lois de comportement : une loi rhéologique de type Kelvin-Voigt, des lois de Fourier et de Darcy généralisées et une équation de type Nernst-Planck (loi de Fick généralisée).

Nous avons appliqué ce modèle au cas d'une lame de PEA encastrée - libre soumise à une différence de potentiel continue entre ses deux faces (cas statique). L'amplitude de la flexion étant grande, les efforts appliqués et la flèche sont calculés en utilisant un modèle de poutre en grands déplacements. Nous avons également étudié la force de blocage, c'est-à-dire la force qu'il faut exercer sur l'extrémité libre pour empêcher son déplacement. La permittivité du milieu est une donnée critique pour l'obtention de résultats numériques ; elle est susceptible d'augmenter avec la concentration en cations. Nous avons comparé plusieurs modèles de permittivité : constante, fonction linéaire ou affine de la concentration en cations.

Les simulations numériques ont été effectuées dans le cas du Nafion. La résolution du système d'équations nous a permis de tracer les profils de concentration en cations, de charge électrique, de potentiel, de champ et d'induction électriques et de pression dans l'épaisseur de la lame. On constate que ces grandeurs sont quasiment constantes dans la partie centrale de la lame et varient de façon drastique au voisinage des électrodes. Nous avons confronté les valeurs obtenues pour la flèche et de la force de blocage aux données expérimentales publiées dans la littérature pour les trois modèles de permittivité. Nous avons étudié l'influence de la géométrie de la lame : dans la gamme de valeurs envisagées, la flèche est indépendante de sa largeur, varie approximativement comme le carré de sa longueur et décroît lorsque son épaisseur augmente, ce qui est en bon accord avec les données expérimentales. En revanche, la variation de ces deux grandeurs avec le potentiel électrique imposé dépend du modèle de permittivité choisi. Une analyse critique des trois modèles étudiés est alors proposée.


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