François Bellec, Contre-Amiral, membre et ancien président de l’Académie de marine, directeur honoraire du Musée National de la Marine, Paris
J’aborderai la mécanique horlogère et les instruments de mesures astronomiques (dont un sextant d’un mécanicien brestois retrouvé à Vanikoro) servant à résoudre enfin la longitude, dont Lapérouse fut avec Cook l’un des premiers bénéficiaires. À Brest, en juin 1785, des chefs-d’œuvre de la mécanique de précision furent embarqués à bord de l’Astrolabe et de la Boussole.
François Charru, Université de Toulouse, IMFT (UMR CNRS 5502)
En 1929, le nouveau ministère de l’Air crée quatre Instituts de mécanique des fluides dans les universités françaises – dont un à Toulouse –, instituts qu’il dote de moyens exceptionnels. L’objectif est de redresser, par la formation d’ingénieurs et la recherche scientifique, une industrie aéronautique qui, après la glorieuse période des pionniers, est en perte de vitesse. Ces créations d’instituts marquent l’émergence d’une politique nationale de la recherche, qui s’épanouira avec la création du CNRS en 1939, et la création d’organismes tels que l’Onera après la guerre. C’est cette histoire que nous présenterons, qui lie étroitement science et industrie, vie des institutions, relations internationales, et imaginaire collectif.
Martin Lévesque, Professeur, Polytechnique Montréal
Le grenaillage est un traitement de surface qui consiste à bombarder une surface métallique ductile par des particules projetées à haute vitesse. Les impacts des particules induisent un étirement plastique superficiel incompatible. Cette situation a comme effet d’induire des contraintes résiduelles compressives en surface et en tension au cœur de la pièce traitée. Le procédé est utilisé pour deux applications principales, soient l’amélioration de la vie en fatigue et la mise en forme et la correction de distorsion dans des structures élancées. Lors de cet exposé, je présenterai quelques résultats de recherche couplant expériences et simulations, de l’échelle de la plasticité cristalline jusqu’à celle des avions commerciaux, qui permettent de mieux comprendre et prédire les effets du procédé.
Benoît Appolaire, Université de Lorraine, Institut Jean Lamour (UMR CNRS 7198), Nancy
Dans les matériaux métalliques multiphasés, jouer avec les changements de phase lors des traitements thermiques et thermo-mécaniques est le moyen le plus courant pour former les microstructures dont dépendront leurs propriétés. Si le calcul de microstructures a rejoint la boîte à outils à disposition des ingénieurs pour optimiser les conditions de traitement, les interactions entre mécanique et transformations de phase y sont souvent simplifiées, voire négligées, notamment parce que le détail de la microstructure (morphologies, distributions spatiales…) et de son évolution est essentiel mais particulièrement difficile à prendre en compte. Je montrerai comment les modèles de champ de phase, développés depuis 25 ans, ont permis des avancées significatives sur cette problématique. Aussi, après une brève introduction des principes de cette approche, démontrant pourquoi elle est la plus adaptée à l'échelle mésoscopique (de la centaine de nm au mm), j'illustrerai par quelques exemples dans différents alliages quel rôle peuvent jouer l'élasticité et la plasticité dans des évolutions microstructurales bien connues mais encore mal comprises jusque récemment.
Emmanuel De Langre, École Polytechnique, LadHyX (UMR CNRS 7646), Palaiseau
En interaction fluide-structure on est généralement intéressé par le niveau d’effort induit dans la structure par l’interaction avec le fluide environnant. Dans beaucoup de cas la flexibilité de la structure peut en fait réduire ces efforts. J’en donnerai plusieurs exemples, en statique et en dynamique, sur des systèmes naturels ou artificiels, ainsi que quelques modèles que l’on peut construire, assez simples. Les mécanismes en jeu, qui couplent les déformations de la structure avec l’écoulement, permettent d’imaginer une approche « souple » de la conception mécanique en présence de fluide, en alternative à la tendance habituelle à rigidifier les structures.
La conception des voiliers de compétition fait appel à de nombreuses disciplines de la mécanique : mécanique des fluides, mécanique des solides, interaction fluide/structure, science des matériaux, dynamique des systèmes… Les échelles de temps dans lesquelles évoluent les concepteurs nécessitent cependant de trouver des approches simples et pragmatiques afin de concevoir et dimensionner au plus juste possible les formules 1 des mers. Nous présenterons dans cette intervention des outils et méthodes de conception mis en œuvre chez Gsea Design pour le dimensionnement des monocoques et multicoques de courses.
La fabrication mécanique est un domaine en constante évolution qui doit nécessairement s’adapter aux évolutions sociétales. Ces dernières années, l’industrie est revenue sur le devant de la scène médiatique à l’annonce de mutations fondamentales à venir : Industrie 4.0, fabrication additive, développement durable. Cet exposé présente notre point de vue sur deux problématiques : fabrication additive et fabrication durable, qui sont parmi les deux sujets les plus publiés actuellement. Après une présentation rapide des procédés de fabrication additive, nous nous intéressons à leur industrialisation, aux contraintes associées, aux potentialités et aux limites qui peuvent en empêcher le développement. Le regard porté est à la fois mécanique et industriel et s’inscrit dans une optimisation couplée matériau - procédé - processus - produit. Dans un second temps, nous abordons la problématique de la fabrication durable en posant le concept clé : People, Planet, Profit. Nous présentons deux cas d’étude qui permettent d’illustrer cette problématique. La prise en compte du développement durable induit nécessairement une remise en cause des méthodes usuelles de conception et fabrication et sous entend une optimisation globale du processus. La valeur ajoutée n’est plus nécessairement là où on la cherche.
Jean-François Filipot, France Énergies Marines, Brest
Les phares en mer subissent depuis des décennies les assauts des vagues qui induisent des vibrations pouvant les fragiliser notamment en périodes de tempêtes. Les systèmes de récupération d’Énergies Marines Renouvelables (EMR), telles que les éoliennes offshore fixes ou flottantes où encore les systèmes houlomoteurs vont faire face aux mêmes chargements. Cependant les caractéristiques des vagues et notamment des déferlantes (population la plus dangereuse pour les structures en mer) demeurent mal connues en période de tempêtes, car peu de systèmes de mesure résistent aux éléments dans ces conditions. On présentera ici une expérience conduite depuis un phare en mer (la Jument, au large de l’île d’Ouessant), qui grâce à un dispositif de mesure original a permis de collecter des observations uniques sur des déferlantes géantes et leur impact sur la mécanique de la structure. Nous conclurons sur le transfert de ces enseignements vers l’amélioration des standards de dimensionnement aux extrêmes des systèmes EMR.
Thierry Gloriant, INSA de Rennes, ISCR (UMR CNRS 6226), Rennes
Dans cette communication, nous verrons comment certains alliages biocompatibles à base de titane peuvent être optimisés pour favoriser une transformation martensitique induite sous contrainte qui peut être ajustée afin d’obtenir des propriétés mécaniques (comportement superélastique, effet TRIP-TWIP) adaptées à différents dispositifs médicaux fonctionnels stents endovasculaires, agrafes orthopédiques, arcs orthodontiques, limes endodontiques).
François Hild, ENS Paris-Saclay, LMT (UMR CNRS 8535), Cachan
L’imagerie 3D est devenue un moyen populaire, notamment en France, pour l’analyse des microstructures de matériaux. Lorsque des séries d’images 3D sont acquises au cours d’une seule expérience, il est possible de mesurer des champs de déplacement par corrélation volumique, conduisant ainsi à des résultats 4D. Ces analyses 4D ont été menées depuis deux décennies. La présentation a pour objectif de passer en revue quelques réalisations et les défis de cette technique de mesure. Des expériences ex situ et in situ seront discutées. Un cadre général et unifié de corrélation sera introduit. Diverses sources de biais de mesure et d’incertitudes seront analysées. Les défis actuels seront introduits et quelques propositions seront proposées pour les résoudre.
Djimédo Kondo, Sorbonne Université, Institut Jean le Rond d’Alembert (UMR CNRS 7190), Paris
L’étude du comportement des matériaux du génie civil (sols, roches, bétons) connaît depuis quelques décennies des progrès remarquables tant sur le plan de la caractérisation fine des mécanismes de déformation qu’en matière de modélisations de phénomènes multiphysiques associés. Il s’avère que bon nombre des avancées réalisées doivent pour beaucoup au déploiement sans précédent d’approches de changement d’échelles prenant en compte certaines spécificités des géomatériaux. Il n’est pas exagéré de parler d’un véritable mariage d’intérêt qui semble bien inscrit dans la durée tout en laissant entrevoir de grands défis scientifiques. Nous illustrerons ce propos en nous appuyant sur plusieurs développements récents. Dans un premier temps, nous présenterons brièvement des résultats portant sur la micromécanique de géomatériaux quasi fragiles qui, par nature, sont susceptibles à une multifissuration évolutive sous chargements poromécaniques. Puis, nous nous intéresserons à des roches poreuses ductiles pour lesquelles le couplage entre phénomènes de compaction de pores et déformation plastique par cisaillement s’avère crucial. Dans ce cadre, l’apport décisif de diverses approches d’homogénéisation non linéaire sera souligné et nous montrerons comment les résultats établis ont pu être étendus au contexte des géomatériaux nanoporeux où les effets de taille de pores sont manifestes. L’argilite du Callovo Oxfordien, matériau envisagé comme hôte de stockage souterrain de déchets, constitue un exemple pour lequel nous évoquerons certaines des recherches actuelles visant à prédire les processus d’instabilités et de rupture autour des ouvrages concernés.
David Le Touzé, École Centrale de Nantes (ECN), LHEEA (UMR CNRS 6598), Nantes
La méthode SPH (Smoothed Particle Hydrodynamics) est une méthode numérique « de niche » qui connaît un intérêt grandissant pour les écoulements à surface libre ou interface complexe et les problèmes multi-mécaniques ou multi-physiques. Cette méthode, faisant partie de la classe des méthodes particulaires, i.e. lagrangiennes et sans maillage, repose sur des fondements théoriques radicalement différents de ceux des méthodes maillées. On rendra compte des progrès récents de la compréhension théorique de cette méthode numérique, et on la positionnera vis-à-vis des méthodes numériques classiques de la mécanique des fluides. On s’intéressera ensuite à son application aux écoulements à surface libre complexe, dont on donnera les éléments clefs en termes théoriques, numériques et implémentatoires. Pour finir, on fera une brève revue applicative de cette méthode pour les écoulements à surface libre complexe.
Sébastien Mercier, Université de Lorraine, LEM3 (UMR CNRS 7239), Metz
L’endommagement ductile des métaux est un sujet très prisé dans la littérature depuis des décennies. De nombreux travaux ont été proposés pour répondre à une problématique en général macroscopiquement quasi-statique. Dans cette communication, nous allons discuter des approches proposées au LEM3 sur l’évolution de l’endommagement ductile lors de chargements très rapides. À partir d’une analyse micromécanique, des travaux de la littérature en quasi-statique sont étendus en dynamique rapide. Une spécificité des chargements en grande vitesse est la nécessité de tenir compte de l’inertie locale ou micro inertie. Un parallèle pourra être rapidement établi avec la modélisation de la croissance d’une bulle dans un fluide, en mécanique des fluides. Du fait des grandes vitesses de déformation, une régularisation naturelle opère grâce à l’apparition d’une longueur interne, reliée à la microstructure du matériau poreux : la taille des vides. Cet exposé permettra de mettre en avant l’apport de cette contribution micro-inertielle au travers d’exemples classiques en dynamique rapide (essais d’impact de plaque, rupture dynamique, effets de forme des vides).
Malgré un niveau de bruit peu important, les occupants de bureaux ouverts (parfois nommés bureaux paysagers) se plaignent souvent des conditions sonores. La gêne principale est créée par les voix des autres occupants : au-delà du manque d’intimité ressentie dans ces conditions, la parole a une influence particulière sur de nombreux processus cognitifs. Cet exposé tentera une synthèse des nombreux travaux réalisés sur le sujet : (1) mise au point de questionnaires permettant d’évaluer la gêne in-situ, (2) mesure de la perturbation apportée par la parole lors de la réalisation de certaines tâches dans des conditions de laboratoire plus ou moins proches de la réalité du travail, (3) proposition d’indicateurs permettant de quantifier cette perturbation et (4) solutions techniques pouvant être apportées.
Le vieillissement est une caractéristique inhérente de la nature. Or beaucoup de règles de dimensionnement en mécanique sont établies par l’étude d’un matériau dans un état initial. Pour de nombreuses raisons, liées, soit simplement à la température, soit à la température et à l’environnement, soit aussi parfois à la température, l’environnement et la sollicitation mécanique elle-même, le vieillissement de certains matériaux métalliques ne peut être négligé pendant la durée de vie prévue d’une pièce. C’est-à-dire que les évolutions de microstructure, de composition chimique, des phases présentes, des contraintes internes, des défauts sont suffisamment notables pour que leurs impacts sur le comportement mécanique de la structure doivent être pris en compte. Quelques cas nous permettront de l’illustrer.
Le déclin spectaculaire de la banquise arctique au cours de ces dernières décennies est généralement considéré comme une signature exemplaire du changement climatique global en cours. Néanmoins, les modèles climatiques sous-estiment la rapidité de ce déclin. On montrera comment les processus mécaniques (endommagement, fracturation, dérive), mal représentés dans ces modèles, peuvent impacter négativement le bilan de masse de la banquise, et renforcer son déclin.