CFM 2019

Une représentation d'état pour la commande en boucle fermée des écoulements cisaillés
Johan Carlier  1, 2, *@  , Christophe Collewet  1, 2, *@  
1 : FLUMINANCE
INRIA, Irstea
2 : Optimisation des procédés en Agriculture, Agroalimentaire et Environnement  (UR OPAALE)
Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture
* : Auteur correspondant

Nous proposons dans cet article une représentation d'état (matricielle) générique pour la commande en boucle fermée des écoulements cisaillés. L'objectif de la commande est ici de réguler ces écoulements autour d'un état stationnaire. Nous supposons que l'actionneur agit aux frontières du domaine et que l'état de l'écoulement peut être reconstruit à partir de mesures image.

Notre approche est analogue à celle de Anda-Ondo et al. (2017), dédiée à la commande en boucle fermée de la couche de mélange. Nous déduisons de la discrétisation spatiale des équations de Navier-Stockes linéarisés autour d'un écoulement désiré (et non perturbé) une représentation d'état matricielle décrite par un système linéaire et invariant en temps. Cette représentation d'état matricielle est constituée de la matrice d'évolution A et du vecteur de commande Bu qui traduit l'effet de la commande u sur l'écoulement. En revanche, nous nous sommes efforcés ici de rendre cette approche suffisamment générique pour qu'elle puisse s'appliquer à un large panel d'écoulements par droites parallèles, ou presque par droites parallèles. Pour illustrer cet aspect, nous déduisons de notre approche une représentation d'état matricielle pour l'écoulement de canal plan périodique et l'écoulement de couche de mélange spatiale.

L'écoulement de canal plan périodique est souvent utilisé dans la littérature pour évaluer les stratégies de commande en boucle fermée, avec en l'occurrence un contrôle aux frontières par soufflage/aspiration au niveau des parois. Dans cette étude, nous considérons le cas du canal super-critique à Re=10000 dont la commande aux frontières (soufflage/aspiration périodique aux parois inférieure et supérieure du canal) à pour objectif de stabiliser l'écoulement en s'opposant indirectement aux modes 2D linéairement instables qui s'amplifient au cœur de celui-ci.

La couche de mélange spatiale est un écoulement convectivement instable. Une perturbation impulsionnelle se déplacera plus rapidement vers l'aval que son expansion spatiale, conduisant in fine à une décroissance en temps de son amplitude en n'importe quel point de l'espace. L'écoulement est donc stable et l'objectif de commande est ici de réguler l'écoulement de couche de mélange autour d'un état souhaité stationnaire en présence de perturbations entretenues et relativement lentes. Dans cette étude, la commande est de même nature que la perturbation, en l'occurrence la vitesse des deux écoulements co-courant.

Un soin particulier est apporté à l'élaboration de la matrice d'évolution A avec notamment l'utilisation d'opérateurs matriciels de differentiation basés sur les schémas compacts. Dans le cas de perturbations de type onde plane, nous pouvons reproduire le comportement en terme de stabilité linéaire de l'écoulement de canal plan périodique obtenu par Orszag (1971) et de la couche de mélange temporelle obtenu par Michalke (1965), validant ainsi notre représentation d'état.

Le gain de retour d'état obtenu selon une loi de commande optimale LQR est ensuite implémenté dans Incompact3D (Laizet et Lamballais, 2009), un solveur 3D non-linéaire des équations de Navier-Stokes publié sous licence GNU GPL V3. Les résultats de simulation montrent que le gain de retour d'état stabilise l'écoulement de canal plan périodique, supprimant ainsi le développement du mode instable, et retarde l'apparition des tourbillons primaires dans la couche de mélange, en rejetant les perturbations (endogènes) relativement lentes survenant au niveau de la commande. Ces deux résultats illustrent ainsi l'aptitude d'une commande en boucle fermée, basée sur un modèle physique linéairisé, à stabiliser un écoulement autour d'un état stationnaire et à assurer un certain niveau de robustesse vis-à-vis de perturbations endogènes.

Anda-Ondo D., Carlier J. et Collewet C. (2017) In 20th IFAC World Congress, Toulouse
Michalke A. (1965) J Fluid Mech 23:521–544
Orszag S. A. (1971) J Fluid Mech 50(04)
Laizet S. et Lamballais E. (2009) J. Comput. Phys., 228(16)

 


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