Les systèmes électroniques sont en constante densification : on souhaite d'une part traiter des quantités de données toujours plus importantes et d'autre part minimiser la taille des appareils. Les cartes de circuits imprimés sont touchées par cette tendance et leurs fabricants sont menés à la limite de leur savoir-faire. Dans le cadre d'applications aéronautiques ou spatiales, les circuits imprimés doivent suivre des tests de qualification contraignants, censés reproduire les conditions d'utilisation. Ces programmes consistent à appliquer un certain nombre de cycles thermiques aux circuits imprimés, sans déceler de défaillances. Or les matériaux constituant les cartes ont des comportements thermomécaniques très différents. Les écarts de coefficients d'expansion thermiques entre le cuivre et les substrats isolants peuvent mener à l'apparition de contraintes d'origine thermiques importantes. La simulation numérique peut permettre de contourner la conception de circuits imprimés par prototypes successifs, mais pour cela le comportement de tous les matériaux en présence doit être précisément identifié, voir [1] pour le comportement thermomécanique des substrats isolants.
L'identification du comportement mécanique du cuivre est aussi importante car il est présent sous des épaisseurs d'environ 20 microns. De plus le cuivre est le porteur de l'information électrique. Sa rupture engendre automatiquement la défaillance de la carte et du système électronique. Sous chargement thermique cyclique et du fait de sa faible limite d'élasticité, le cuivre va être soumis à un chargement oligocyclique. Afin d'identifier l'écrouissage isotrope et cinématique des films minces de cuivre, il a été nécessaire de mettre en place une méthode expérimentale permettant de réaliser des sollicitations cycliques (traction-compression) sur des films de cuivre. Pour cela, un substrat possédant une déformation élastique plus importante que celle du cuivre est utilisé comme support, recouvert sur chaque face d'un feuillard de cuivre. Une méthode inverse permet d'isoler de l'ensemble substrat + cuivre, le comportement du cuivre en traction-compression. Le comportement du cuivre peut alors être identifié avec le modèle de Lemaitre-Chaboche [2].
Dans la suite de ce travail, des essais de fatigue cycliques ont été réalisés sur des éprouvettes de substrat + cuivre, avec un design innovant, permettant de mesurer la résistance électrique du cuivre au cours des cycles. La déformation est mesurée sans contact avec un dispositif de corrélation d'images. L'augmentation brutale de la résistance est corrélée à la rupture du film de cuivre, permettant ainsi d'accéder à la courbe amplitude de déformation versus nombre de cycles à rupture. Les paramètres du modèle de Coffin-Manson ont ainsi pu être identifiés sur une large gamme d'amplitude de déformation. Les informations sur le comportement des matériaux permettent alors de réaliser des simulations de structures circuits imprimés et de concevoir des produits fiables en partenariat avec le constructeur de circuits imprimés. Un essai sur circuit réel est en cours afin de valider ce travail.
[1] G. Girard, M. Jrad, S. Bahi, M. Martiny, S. Mercier, L. Bodin, D. Nevo, S. Dareys Experimental and numerical characterization of thin woven composites used in printed circuit boards for high frequency applications ; Composite Structures (2018), pages 140-153, vol 193 ; doi : 10.1016/j.compstruct.2018.03.037
[2] Lemaitre, J., Chaboche, J.L., 1994. Mechanics of solid materials. Oxford University Press, Cambridge