CFM 2019

Utilisation de la méthode d'auto-échauffement à haute-température pour la détermination rapide des propriétés en fatigue à grand nombre de cycles de deux alliages métalliques pour turboréacteurs aéronautiques
Vincent Roué  1, 2@  , Cédric Doudard  2@  , Sylvain Calloch  2@  , Adriana Mattiello  1@  , Quentin Pujol D'andrebo  1@  
1 : Safran Aircraft Engines
Safran Group
2 : Institut de Recherche Dupuy de Lôme  (IRDL)
ENSTA Bretagne, Centre National de la Recherche Scientifique : UMR6027

Les pièces de turboréacteur sont soumises à des chargements complexes et pour différentes températures d'utilisation. Le dimensionnement en fatigue de ces pièces se fait à partir de diagrammes de Haigh-Goodman, représentant les limites d'endurances (en contraintes alternées) en fonction des contraintes moyennes pour différentes températures. Classiquement, les différents points sont obtenus à partir d'essais de fatigue suivant un protocole Staircase. De très nombreux essais de fatigue sont donc nécessaires pour chaque condition de rapport de charge et de température, ce qui s'avère long et coûteux (notamment pour des essais à haute température). L'objectif de l'étude est alors de mettre en place une méthode de détermination rapide des propriétés en fatigue à grand nombre de cycles pour différents alliages métalliques. Deux matériaux sont présentés. Dans la partie froide du turboréacteur, un alliage de titane (TA6V) est caractérisé jusqu'à 350°C pour des applications de disques de compresseur. Dans la partie chaude, un superalliage monocristallin à base nickel (AM1) est étudié jusqu'à 1000°C pour des applications d'aubes de turbines.

La méthode d'auto-échauffement sous chargement cyclique est utilisée et adaptée pour réaliser des essais à haute température. En effet, cette méthode s'avère efficace pour réduire le temps de caractérisation des propriétés en fatigue à grand nombre de cycles [1]. Elle repose sur l'observation de l'évolution de la température de l'éprouvette au cours d'une succession de blocs avec des amplitudes de chargement croissantes. Pour chaque bloc, la température stabilisée est relevée et est associée à l'amplitude de chargement afin de construire une courbe d'auto-échauffement. À partir d'un certain niveau de chargement, la température stabilisée augmente de façon significative. Cette augmentation est due à l'activation de mécanismes dissipatifs. Lorsque ces mécanismes sont aussi ceux à l'origine de l'endommagement en fatigue, une interprétation de la courbe d'auto-échauffement permet alors de déterminer la limite d'endurance à partir d'une seule éprouvette en quelques heures. De plus, une modélisation probabiliste à deux échelles permet dans certains cas de déterminer la dispersion des essais de fatigue à partir de l'analyse de cette courbe [1]. Ce modèle a été développé et validé sur une large gamme d'aciers à température ambiante.

Dans le cadre de l'étude sur les alliages métalliques pour turboréacteur, il s'agit tout d'abord d'un challenge expérimental : il faut en effet pouvoir mesurer une faible élévation de température de l'éprouvette, l'auto-échauffement sous sollicitation cyclique, dans un environnement à haute température. Il s'agit également d'un challenge de modélisation : il faut en effet développer un modèle permettant de faire le lien entre les mesures d'auto-échauffement et les propriétés en fatigue.

Le protocole d'essai est donc adapté afin de réaliser des essais à haute température. Les systèmes de régulation du four et d'acquisition de température sont optimisés pour pouvoir détecter l'auto-échauffement des éprouvettes. Ainsi des courbes d'auto-échauffement ont été réalisées pour différents rapports de charge et températures (jusqu'à 350°C pour le TA6V et 1050°C pour l'AM1). On observe une influence de ces paramètres sur les courbes d'auto-échauffement, en accord avec leur influence sur les propriétés en fatigue. Deux comportements différents sont observés : pour le TA6V, deux régimes d'auto-échauffement sont présents alors que l'AM1 ne semble avoir qu'un seul régime d'auto-échauffement. La modélisation associée doit donc être adaptée afin de déterminer les propriétés en fatigue des deux matériaux. En effet, ces modèles doivent d'une part décrire les mécanismes dissipatifs, mais aussi ceux à l'origine de la ruine par fatigue.

[1] R. Munier, C. Doudard, S. Calloch, B. Weber, Determination of high cycle fatigue properties of a wide range of steel sheet grades from self-heating measurements, International Journal of Fatigue 63 (2014) 46-61


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