Les nitrures métalliques de titane et d'aluminium (TiAl)N sont des revêtements utilisés depuis de nombreuses années pour leurs propriétés remarquables de dureté et de résistance à l'oxydation. Il a été montré que le module d'indentation et la dureté de revêtements Ti(1-x)AlxN dépendent de la teneur en aluminium et que les propriétés optimales sont obtenues pour x=0,46. Une possibilité d'amélioration de la dureté de ce type de revêtement est de les architecturer en multicouche métal/céramique.
L'objectif est de modéliser le lien entre la dureté d'un revêtement [Ti0,54Al0,46/Ti0,54Al0,46N]n et la période Λ de l'empilement des couches afin de comprendre les phénomènes qui génèrent l'augmentation de la dureté du super réseau aux plus faibles périodes.
Un modèle numérique de l'essai de nanoindentation Berkovich sur des échantillons nanostratifiés a été élaboré. L'interface métal/céramique est considérée parfaite et sans épaisseur. Les comportements élastoplastiques des couches élémentaires de métal et de céramique ont été identifiés par nanoindentation Berkovich sur des échantillons revêtus d'une seule couche. Ce modèle éléments finis 2D axisymétrique permet d'obtenir la courbe d'indentation (P-h) pour des nanostratifiés en fonction de la période Λ et d'une vingtaine d'autres paramètres (élastoplastiques, géométriques, dimensionnels, ...).
Afin de confronter ce modèle à des expériences, des nanostratifiés d'épaisseurs 2 micromètres de différentes périodes Λ (de 4 à 50 nm) ont été architecturés par pulvérisation réactive à signal de commande cyclique (RGPP) en alternant une couche Ti0,54Al0,46 et une couche Ti0,54Al0,46N. Les échantillons ainsi obtenus ont été testés par nanoindentation Berkovich.
Les prévisions du modèle sont en très bon accord avec l'expérience pour la plus grande période (50 nm), mais se dégrade lorsque la période diminue. Le modèle ne permet pas de reproduire l'augmentation de la dureté aux plus faibles périodes. Une analyse de sensibilité du modèle de la courbe d'indentation a été menée, elle montre l'importance de la proportion d'épaisseur dans le système bicouche métal/céramique et de la plasticité de la couche métallique. Une analyse spectrographique par spectroscopie de perte d'énergie des électrons au microscope électronique à transmission pour la période Λ=10 nm a mis en évidence une proportion d'azote dans la couche métallique sur quelques nanomètres, signe d'une intermixion des couches. Ces résultats montrent que des phénomènes élastoplastiques à l'interface métal/céramique jouent un rôle important aux faibles périodes et remettent en cause l'hypothèse initiale d'interface parfaite et sans épaisseur.
Il est montré que l'ajout dans le modèle d'une couche de transition ayant un comportement élastoplastique moyen métal/céramique permet de reproduire les courbes de nanoindentation expérimentales et que l'épaisseur de cette couche est en très bon accord avec les observations spectroscopiques.