L'instabilité fluide-élastique a lieu lorsque l'écoulement injecte une quantité d'énergie suffisante au système. Celui-ci devient alors linéairement instable, et les grands déplacements qui en découlent sont limités par des effets non-linéaires,comme la présence de butées. Or, en raison de la non-linéarité, il est courant que plusieurs régimes dynamiques coexistent pour les mêmes conditions. De plus, la présence de forces de couplage du type fluide-élastique rend la modélisation complexe. Pour ces raisons, la prédiction de réponses de ce type de problème n'est pas triviale et fait souvent appel à de nombreux calculs paramétriques réalisés par intégration temporelle.
Dans le cas présent, on s'intéresse aux vibrations induites par un écoulement transverse sur une poutre encastrée-libre dans un support à jeu. Ce système est représentatif de la problématique des faisceux de tubes d'échangeurs de chaleur dans un réacteur nucléaire à eau préssurisée. Un modèle pertinent des efforts de couplage est celui proposé par Granger et Païdoussis [1], où un effet mémoire a été introduit. On propose une démarche numérique alternative pour l'étude paramétrique de ce système avec la méthode d'équilibrage harmonique (HBM). Le problème différentiel dans le temps est alors remplacé par un problème algébrique non-linéaire dans le domaine fréquentiel. Des cycles limites, ou oscillations périodiques, sont ainsi obtenus directement. Ceci implique d'augmenter le système d'équations d'origine afin de trouver la fréquence des cycles, car celle-ci n'est pas donnée explicitement par un forçage externe. On définit cette nouvelle équation en raisonnant sur la conservation d'énergie et on montre que, contrairement au cas des systèmes "vraiment" autonomes, les forces de couplage imposent implicitement les fréquences admissibles. Pour les efforts non-linéaires de contact, on utilise une modélisation par pénalisation et on obtient leurs composantes dans le domaine fréquentiel en utilisant une technique hybride temps-fréquence: les forces sont calculées dans le domaine temporel, où leur expression analytique est connue, puis on revient en fréquentiel par la transformée de Fourier discrète.
Ensuite, on applique une méthode de continuation pour tracer des branches entières de solutions en fonction du paramètre principal du problème: la vitesse de l'écoulement. Sur certaines plages de vitesse, on constate un comportement bi-stable, avec existence de plusieurs branches de solutions de nature qualitativement différente. Ceci est en accord avec les résultats de la littérature (Borsoi et al. [2]). Par contre, tous les cycles trouvés par la HBM ne sont pas observables par intégration temporelle, car ils sont instables. Ainsi, on présente également une technique pour évaluer la stabilité des cycles obtenus.
Références:
[1] Granger, S.; Païdoussis, M.; An improvement to the quasi-steady model with application to cross-flow-induced vibrations of tube arrays, Journal of Fluid Mechanics, 1996.
[2] Borsoi, L. et al., Evolution of the dynamics of loosely supported tubes under cross-flow with the flow velocity and the gaps size, Proceedings of the 9th International Symposium on Fluid-Structure Interactions, 2018.