Depuis quelques années, les bateaux utilisés pour la course au large sont de plus en plus rapides. Cela se voit notamment au niveau du Vendée Globe, qui voit à quasiment chaque nouvelle édition un nouveau record du monde de vitesse. Cette grande amélioration des performances des bateaux à voiles est due aux progrès constants qui ont été faits dans la conception et la fabrication des appendices des navires. Cela est particulièrement vrai pour les foils, les safrans et les dérives. Ces appendices et notamment les foils sont également appliqués aux bateaux à moteur et permettent une réduction de la consommation de carburants et un accroissement de confort.
Malgré ces progrès incroyables, de nombreux axes d'améliorations sont encore possibles. L'adaptabilité de ces appendices aux variations de chargement est notamment un des grands chantiers de la course au large. En effet, les appendices ne sont conçus que pour un intervalle d'écoulement précis et certains cas de chargements précis, donc lorsque les conditions de chargements subis par ceux-ci sortent des limites de conceptions, ces composants du navire voient une grande diminution de leurs propriétés hydrodynamiques ou rompent sous les contraintes imposées.
Nos travaux de recherches s'orientent donc vers le morphing autonome de ces composants. C'est-à-dire, la capacité à changer leur forme de façon à maximiser ou à minimiser certaines de leurs propriétés hydrodynamiques sans la présence et l'utilisation d'actionneurs.
La méthodologie employée se base sur une analyse bibliographique de systèmes de morphing passif utilisé dans le domaine de l'aéronautique. Parmi les stratégies actuelles, nous nous focalisons sur l'incorporation d'un métamatériau auxétique dans l'âme d'un aérofoil 2D. Un métamatériau est un matériau artificiel architecturé qui présente des propriétés physiques que l'on ne retrouve pas dans la nature. Le terme auxétique décrit les matériaux à coefficients de Poisson négatifs.
Ainsi, lorsqu'il est soumis à des contraintes d'écoulement, le foil adaptatif peut se cambrer ou se décambrer dans la direction de la corde. Ce système, actuellement à l'étude sur les ailes d'avions, est censé leur permettre d'augmenter leur coefficient de portance ou de diminuer leur coefficient de traînée en fonction des configurations de vols.
Lors du cambrage du foil, les efforts exercés sur celui-ci sont semblables à un gradient d'efforts de flexion. Or, les mécanismes de déformations présents dans la structure de métamatériaux auxétiques sont très peu documentés et très peu étudiés que cela soit en flexion ou en cambrage de foil. C'est pourquoi, nous avons décidé de mener deux expériences : une numérique et une expérimentale.
Le travail numérique réalisé sur ABAQUS nous permet d'homogénéiser le comportement d'une cellule microscopique unitaire du métamatériau à l'échelle de l'âme de notre foil. Une fois le comportement de plusieurs cellules de métamatériaux homogénéisées, nous réalisons des simulations de flexion de poutres en métamatériaux. Nous remplaçons ici le foil par une géométrie simplifiée, la poutre, dans le but de réaliser les premiers essais mécaniques de caractérisation sur des géométries simples.
Le travail expérimental va consister à réaliser des tests de flexion 3 points sur des poutres constituées de différents métamatériaux. Les répartitions de contraintes dans le métamatériau de la poutre seront mesurées à l'aide de la photoélasticimétrie. La flèche maximum de flexion sera comparée aux valeurs numériques précédemment obtenues. Les foils 2D et les métamatériaux sont élaborés par fabrication additive pour permettre la réalisation de formes complexes.
Les résultats de ces deux expériences nous permettent de mieux comprendre les mécanismes internes présents dans le métamatériau constituant l'âme du foil. Une extension au foil est attendue suite à l'obtention de ces résultats.